Important : Pour des raisons de confidentialité, de conservation, de sécurité (etc) je ne donnerais pas la localisation de cet endroit. Merci de votre compréhension.


C’est en cherchant sur Google Maps que j’ai découvert ce lieu. En vue aérienne je pensais que c’était une «simple» maison, et une chose m’attirait : une forme circulaire, que j’ai pris au début pour un reste de cheminée, comme si le lieu avait un passé industriel. Poussant un peu plus mes recherches, je ne trouve rien sur ce lieu, puis je tombe sur un article listant des lieux abandonnés dans la région et parlant d’une certaine «blanchisserie teinturerie abandonnée».

Me demandant si il s’agit de ce lieu je tape «blanchisserie + nom de la rue» dans Google, et j’arrive pile au bon endroit. Le lieu était bel et bien l’ancienne blanchisserie mentionnée dans l’article. Mais apparemment de la blanchisserie il ne restait plus que la maison où habitait le propriétaire de l’entreprise, et peut-être aussi son personnel. Via mes recherches j’obtins également l’année de la fermeture du site (1994) ainsi que le nom et le prénom du dernier propriétaire, décédé en 2012 à l’âge de 85 ans.

C’est par un beau matin sans nuages que je me mis en route vers cette grande maison en ruines située en bord de Seine. Y accéder ne fut pas bien difficile, mais évoluer à l’intérieur ne fut pas de tout repos, un incendie ayant ravagé le lieu. Quand ? Nous le verrons plus loin via les vues aériennes. Ci-dessous, un aperçu du rez-de-chaussée. Débris, détritus et végétation : il n’y a clairement plus rien à sauver…

Réussissant à accéder à ce qui reste du premier étage, j’arrive à faire quelques photos qui témoignent de ce qui reste - c’est-à-dire pas grand-chose. Quand je vois la taille des arbustes je me dis que l’incendie s’est déroulé il y a quelques années de ça, en tout cas c’est récent. Nous verrons plus loin sur cette page que c’est effectivement le cas.







Me retournant, je découvre ce que j’avais vu sur Google Maps et que je prenais pour un reste de cheminée industrielle : il s’agit en fait de la carcasse de l’escalier en colimaçon qui desservait les différents niveaux de la maison. Extrêmement dangereux, je m’en suis approché juste ce qu’il faut pour le prendre en photo et pas plus :

Ayant pris en photo ce que je pouvais à cet endroit de la maison, je ressors par là où je suis entré et fait le tour du bâtiment pour voir s’il y a d’autres choses à découvrir. Me faufilant à travers des ronces je découvre une autre porte me menant à d’autres zones du rez-de-chaussée. Progressant à pas lents, j’arrive finalement au pied de l’escalier en colimaçon vu plus tôt.





Passant à travers un couloir incertain, j’arrive à une autre partie de la maison, un peu moins ravagée que le reste, mais tout de même très dangereuse. Ici aussi le toit a disparu. Murs couverts de tags, détritus et gravats jonchent le sol. Descendant un petit monticule de débris, je découvre des pièces plongées dans le noir et couvertes de suie. Rien de rassurant, et l’occasion de se demander pourquoi la ville ne rase tout simplement pas un lieu aussi dangereux.









Pensant avoir fait le tour de cette triste ruine située à la vue de tous en pleine ville, je me pose un instant et apprécie la compagnie de minuscules plantes poussant dans cette désolation.

Rebroussant chemin, je range mes affaires en me demandant ce que je vais bien pouvoir raconter sur cette maison en ruines ne présentant à priori aucun intérêt historique ou architectural. Ok, l’escalier en colimaçon est joli, mais c’est un peu mince. Et nulle trace d’une quelconque activité de blanchisserie vu qu’il s’agit de la partie logement de l’entreprise. Arrivé à la dernière pièce de la maison, prêt à sortir, je me retourne une dernière fois pour dire au revoir à la ruine, et là, mon regard est attiré par quelque chose contre le mur. Quelque chose qui a l’air plutôt joli.

M’approchant, je découvre un vieux papier peint de toute beauté. Impossible pour moi de le dater, mais il y a là quelque chose de beau et d’émouvant à contempler ce papier peint qui a survécu à l’incendie de la maison. Ces personnages, leurs mouvements, l'insouciance de tout ce petit monde à vivre ici au milieu de toute cette désolation, il y a ici quelque chose de vraiment fascinant. C’est à ce moment de la visite que je me dis que cela valait le coup de venir. Oui, ce lieu ne présente pas un grand interêt, oui l’escalier en colimaçon n’est pas très visible, mais le papier peint avec ces personnages ayant survécu ! Une très belle surprise qui fait que je termine cette visite avec la satisfaction d’avoir pu documenter quelque chose qui sera probablement amené à disparaitre.

Quelque temps plus tard je sèche un peu pour trouver un nom fictif à ce lieu alors je poste des images du papier peint sur Twitter en demandant aux gens de proposer une idée de nom. uUe personne, Jill, propose alors "La Blanchisserie Fragonard", que je trouve particulièrement bien trouvé (exemple). Merci Jill ! Suivez-la sur Twitter ici.















Ci-dessous, quelques clichés faits avec le drone une fois ma visite terminée :















Concernant l’histoire de ce lieu, j’ai réussi à savoir que c’était une ancienne blanchisserie teinturerie, mais je n’ai rien trouvé de plus, probablement car le lieu n’était pas bien important d’un point de vue historique. Il semble que la maison soit très ancienne car sur cette vue de 1919 ci-dessous elle est déjà là (en vert). Le bâtiment en-dessous (en orange) n’est presque plus visible de nos jours, il n’en reste que le sol, et je ne suis pas sûr qu’il faisait partie du même lieu. Après cette vue de 1919, une autre vue datant de 1923.






Ci-dessous, le site en 1949. Sur cette vue on voit mieux que le bâtiment au sud de la maison (en vert) ne fait probablement pas partie du même lieu. A l’époque de cette photo, le (futur) propriétaire a 22 ans.

Ci-dessous le site en 1956, et juste après une vue de 1962 où l’on peut constater que l’entreprise s’est agrandie avec l’ajout d’autres bâtiments. Celui à gauche de la maison continue d’être peu à peu grignoté par la végétation.



Ci-dessous des vues de 1965, 1966 et 1969 :





Ci-dessous une vue de très belle qualité datant de 1971. J’aime beaucoup les nombreux détails que l’on peut voir (voitures, tuiles, fenêtres). En bas à droite, l’autre bâtiment continue à être recouvert de végétation. A cette époque le dernier propriétaire a 44 ans et vit très probablement dans la maison présentée plus haut.

Ci-dessous le site en 1976 :



Ci-dessous deux vues datant de 1979 où l’on peut voir que le toit du bâtiment situé à côté de la maison s’est effondré, ou a été détruit volontairement car dangereux.



Ci-dessous le site en 1987 et 1990. Entre les deux images on constate deux choses (entourées de cercles) : un entrepôt à toit de tuiles a disparu, et ce qui ressemble à une maison a été remplacé par ce qui est aujourd’hui un transformateur électrique.



Ci-dessous, le site en 1994, année où la blanchisserie teinturerie ferme ses portes. Cette année-là le propriétaire est âgé de 67 ans. Vit-il encore dans la maison a cette époque, où quitte-t-il les lieux ? Je n'en ai aucune idée.

Ci-dessous le site en 1999. Rien ne semble avoir changé :

C'est entre 1999 (ci-dessous) et 2003 (ci-dessous) que la partie "entreprise" est démolie. On le voit bien sur la vue ci-dessous. La maison, elle, est toujours là.

Ci-dessous, le site en 2004 et 2005 :



C'est entre 2005 et 2006 (ci-dessous) que la toiture disparait suite à un incendie, d'après le seul article que j'ai pu trouver et qui évoque ce lieu le temps de trois phrases.

Ci-dessous le site 2011. Il existe de nombreuses autres vues aériennes de cette période, mais elles montrent toutes la même chose : une vieille bâtisse délabrée qui attend d'être démolie, un jour peut-être...