Cette page présente un lieu démoli en 2024. Il ne sert donc à rien de chercher à le localiser.


Tout commence durant l’été 2021 quand un camarade explorateur m’envoie des photos prises au smartphone d’une maison abandonnée. Une maison située en pleine ville, et découverte par hasard lors d’une promenade à vélo. Sur ces photos je vois que la maison est encore en très bon état (pour un lieu à l’abandon, évidemment). Ci-dessous une sélection des photos reçues à l’époque. Merci à Yves de me laisser les publier ici :





Au début je doute que la maison soit «vraiment» abandonnée tellement il reste de choses, mais Yves m’assure que c’est bien le cas. Je place alors cette curieuse maison en haut de ma liste de lieux à explorer, et c’est par un matin ensoleillé de septembre que je viens la documenter, seul. Le coin étant très tranquille, la visite se passe très bien, même si quelques bruits me filent la chair de poule : fenêtres bougeant à cause d’un courant d’air, bruit d’un chat se promenant sur le toit en fibrociment, grincement de portes… Des bruits que j’ai déjà entendu des centaines de fois, mais qui filent toujours autant la chair de poule.

Ayant compulsé les photos d’Yves, je sais un peu à quoi m’attendre en explorant le lieu. Pourtant, même en étant averti, c’est une sacrée expérience : objets et documents fourmillent dans tous les coins. Et comme nous le verrons plus bas, l’agencement du site est atypique. Cette visite est longue. C’est une visite comme on en fait rarement, une visite où l’on se sent chanceux d’évoluer dans un environnement aussi riche. Mais une visite où l’on se sent aussi mal à l’aise tant on est entouré d’objets parfois intimes, et aussi face à des documents particuliers que l’on ne voit pas tous les jours en explorant des lieux abandonnés.

Pourtant, la curiosité prend le dessus, et j’arrive à documenter le lieu de façon un peu plus objective, sauf peut-être pour les fameux documents particuliers (j’en parle au paragraphe suivant). En fin de visite, je suis également frappé par quelque chose : je n’ai jamais vu ce lieu sur Internet. Ni sur les groupes Facebook sur lesquels je suis inscrit, ni sur Instagram, ni sur Twitter, ni sur des sites Internet. Nulle part, en ce qui me concerne. Ne sommes-nous que quelques chanceux à le connaitre ? Il semble que c’est le cas.

Une fois rentré, je trie mes photos et décide de scinder la visiter en deux reportages, comme si j’avais visité deux lieux différents, puis de les présenter sur mes réseaux à des semaines d’intervalle. Pourquoi cela ? Pour protéger au maximum le lieu. Il est en si bon état (pour un lieu à l’abandon, encore une fois) et riche de nombreux objets, ce serait dommage qu’il soit découvert puis investi par des personnes mal intentionnées. Créer deux lieux permet de brouiller un peu les pistes… Pour ne pas faire de sensationnalisme je décide également de passer sous silence le fait que le propriétaire des lieux était un nostalgique de Philippe Pétain.

Un peu plus haut je dis que ce lieu était atypique. Ci-dessous voici une illustration montrant en quoi il l’était : au rez-de-chaussée, de plain-pied, nous avons un ancien atelier de tôlerie. A l’étage, via deux escaliers différents, nous accédons à la partie «Habitation» et aux bureaux de la partie «Atelier». C’est la première fois que je vois un lieu (abandonné ou non) agencé de cette façon. C’est comme si à l’origine il y avait une maison, et qu’on l’avait «surélevée» pour y installer en-dessous la partie atelier. D’habitude, dans une maison, la cuisine et le salon sont au rez-de-chaussée. Ici, tout est à l’étage. Tout simplement étonnant !



Les deux reportages que j’ai tiré de ce lieu furent publiés sous deux noms : 1) La «Maison Cherry» (pour la partie habitation) et 2) «La Cathédrale Oubliée» (pour la partie ateliers et bureaux). Vous pouvez découvrir ces deux reportages en cliquant sur les photos ci-dessous. Petite information à savoir : dans le grenier de la maison j’ai trouvé la carte d’identité de l’ancien propriétaire. Celui-ci est décédé en 2004. Au moment de ma visite (2021) le lieu est donc délaissé depuis 17 années.



Lors de la diffusion de ces reportages sur les réseaux sociaux je reçois un message privé d’une personne connaissant cet endroit, et qui l’a visité en 2019. En regardant les photos qu’elle m’envoie je suis stupéfait : en deux ans le lieu n’a presque pas bougé ! Tout juste la cathédrale qui a changé de place. Autre information : la personne qui m’a envoyé ces photos était venue sur place avec un ami «qui venait jouer dans le garage abandonné quand il était petit, au début des années 2010». Ci-dessous une sélection des photos prises en 2019 :







Partageant l’adresse avec des camarades explorateurs de confiance, ceux-ci postent également des photos du lieu. Cafarnaom suivra mon idée de scinder le lieu en deux et publiera comme moi deux reportages : 1) «Maison Sheol» (pour la partie habitation) 2) «Atelier Tenakee» (pour la partie atelier). Cliquez sur les vignettes ci-dessous :



En 2022 je reviens sur place avec des amis. A cette occasion je fais des photos au drone de la maison et de l’atelier. L’occasion d’un peu mieux voir (et vous montrer) à quoi ressemblait le site à cette époque.







Toujours en 2022, au moment de la conception de mon troisième livre, «Glauque Land, 25 ans d’Urbex» je décide de placer le lieu dans le livre parmi d’autres endroits à l’abandon, mais cette fois-ci en fusionnant les deux reportages (Cherry/Cathedrale) et en parlant des documents sur place liés à Philippe Pétain. Pourquoi ? Parce qu’en 2022 un permis de démolir est placé sur le portail de la maison. Le livre sortant en 2023, la maison sera surement démolie d’ici là. Aucun risque donc de vandalisme ou de vidéos sensationnalistes sur Youtube… Ci-dessous, voici le texte figurant dans mon livre «Glauque Land, 25 ans d’Urbex» avec les photos qui l’accompagnent. Ce récit fictif est basé sur la vie (réelle) de l’ancien propriétaire. Le prénom a évidemment été changé.


Journal de Léon, 84 ans, le 25 Juillet 2001


«C’est avec une certaine mélancolie que je retrouve le calme de ma maison. Du moins devrais-je dire le «silence» de ma maison, ses murs n’ayant pas entendu de conversations depuis un moment déjà. Quelle sensation de tristesse de revenir ici après la chaleureuse commémoration de lundi dernier. Que dis-je, chaleureuse, non, mémorable ! Les mots me manquant, cinquante ans que le Maréchal nous a quitté !»

«Présent en tant que délégué de l’association, c’est non sans émotion qu’une fois de plus je fis la traversée en bateau depuis Fromentine jusqu’à l’ile d’Yeu. Je la faisais déjà tous les ans, je m’attendais à ce que nous soyons un peu plus nombreux que d’ordinaire pour les cinquante ans, mais jamais je n’aurais cru que nous serions autant ! Environ trois cents selon le Général le Groignec, que je revis avec plaisir.»

«Avant de commencer le défilé nous nous regroupâmes devant l’Hôtel des Voyageurs. La foule était si dense ! A présent nous devions bien être le double. Non loin de là, d’autres participants se tenaient debout, mais ils n’étaient pas là pour les mêmes raisons que nous. Ils devaient être une vingtaine, dérisoires, tenant des banderoles. L’une d’elles disait «Pétain-Vichy Honte de la France». Des gauchistes évidemment…»

«Ce qui m’a également étonné, alors que le cortège se mit en branle, c’est la proportion de jeunes dans nos rangs. Pas de chevelus, ça non ! De vigoureux patriotes, honnêtes et droits, symbole que la relève était là. Remontant la rue Guist-Hau, nous pûmes échanger quelques regards complices avec les Gendarmes qui nous précédaient. Merci à eux. Passant devant la maison «Luco» nous vîmes avec plaisir que la plaque était toujours là. Puis l’émotion nous gagna un peu plus lorsque nos pas nous menèrent au cimetière.»

«Ici, je fis un discours qui fut apprécié si j’en juge par les applaudissements. Il y eut une distribution de médailles commémoratives : cinq cents exemplaires, toutes trouvèrent preneurs ! Quelle joie, le Maréchal devait à coup sûr nous regarder avec bienveillance de là-haut. Nous priâmes quelques instants pour le salut du martyr du fort de Pierre-Levée, puis nous prîmes la direction de Notre-Dame du Port.»

«J’écris ces lignes depuis mon bureau et j’ai encore en tête le «Salve Regina» final qui clôtura la célébration. Mon tourne-disque ne fonctionne plus et je ne sais pas bien faire marcher le lecteur de compact-disques… Je me fais vieux, mais aujourd’hui je me sens moins seul car j’ai pu rapporter un émouvant souvenir de ce cinquantième anniversaire de la mort du Maréchal à l’île d’Yeu.»

«Ou plutôt devrais-je dire «DIEU», car lors de cette célébration nous avons changé la croix de bois qui ornait la tombe du Maréchal. Abimée depuis les années par les intempéries, celle-ci faisait peine à voir. Désormais il y en a une toute neuve ! Et, suprême honneur, j’ai pu rapporter ici la croix qui fut changée. Quand je la regarde je me sens moins seul. C’est comme si l’esprit du Maréchal était là, avec moi…»

«De part la nature de son propriétaire, voilà une visite qui ne me laissa pas indifférent. Au début je pensais visiter la maison d'un admirateur du Maréchal Pétain, mais au fil des documents trouvés sur place je me rendis compte que j'avais affaire à une personne très impliquée dans l'entretien de la mémoire de Philippe Pétain. Visiter une maison aussi remplie de souvenirs (dont la fameuse croix) reste un souvenir impérissable d'exploration urbaine sur le plan historique. Démolie en 2022, la maison et tous ses artefacts d'un autre temps disparurent à jamais.»

Remarque : ce n’est qu’en 2024 que la maison sera démolie, mais à l’époque de la rédaction du texte je pensais que ce serait en 2022. Certaines choses prennent du temps… Ci-dessous les photos publiées dans le livre (ainsi que d'autres, en bonus) avec les textes de légende qui renvoient aux photos ci-dessous. «C'est rare que je visite des lieux où il reste autant de mobilier, d'objets ou de documents. Et je dois dire que je ne m'en plains pas, car il y a tant de choses à documenter dans ce genre de lieu qu'on peut vite avoir le tournis. Chose étonnante pour cette maison située en pleine ville et à l'accès très simple : pas de dégradations, pas de tags.»

«Au début, en voyant des photos que des amis m'avaient envoyé, j'avais peur d'avoir la sensation d'être un peu trop «chez quelqu'un», sensation que je ne cherche pas à ressentir. Et puis, au fil de la visite, vu l'état du lieu, je compris que la maison était à l'abandon depuis plus de quinze ans. Un véritable voyage dans le passé à trente minutes de Paris.»







«Ca ne peut pas se voir sur une photo, mais visiter une maison (habitée ou non) dont les fenêtres n'ont pas été ouvertes depuis longtemps est une expérience olfactive particulière, surtout quand celle-ci est visitée par des chats. Il n'était pas rare que je visite certaines pièces en me bouchant le nez.»

«Faisant un petit tour du côté de l'atelier situé au même endroit que la maison, je tombe sur une maquette de la Cathédrale de Chartres ! Très photogénique avec les toiles d'araignées la recouvrant, ce n'est pas souvent que l'on tombe sur quelque chose d'aussi beau, et surtout fragile. D’ordinaire les vandales se font un plaisir de tout casser.»



«Intrigué par une grande bâche recouvrant une forme indéterminée, je la soulève et découvre… un orgue ! Massif et de grande taille, sacrée surprise de découvrir ceci dans la partie "atelier" de ce site.»







«Quelques pas plus loin je trouve un escalier me menant à la partie "bureaux" de l'atelier. A l'intérieur, une infinité de documents, tous plus ou moins liés à la Deuxième Guerre Mondiale. Brochures, livres, magazines, même du côté des cassettes vidéo, tout concerne la guerre.»




«En tombant sur cette croix dans un bureau attenant à la maison, je ne ressentis rien de particulier, passant devant sans m'y attarder. Et puis, visitant le lieu une deuxième fois mais cette fois-ci avec des amis, l'un d'eux me montra un album photo montrant la croix trônant sur la tombe du Maréchal Pétain à l'île d'Yeu. Se pouvait-il que ce soit la même ?»

«Quelques secondes après avoir consulté un album photo, le doute n'était plus permis, il s'agissait bien de la même croix, enfin, une des différentes croix changées au fil des années lorsque les intempéries l'avaient trop abîmées. Probablement celle de la commémoration du 23 Juillet 2001 ? Historique, mais glaçant.»







Ci-dessous d'autres photos prises sur place :











Comme écrit un peu plus haut, je pensais (et j’ai écrit) que la maison serait démolie en 2022. Ce n’est pourtant qu’en 2024 qu’elle sera vidée, puis démolie dans la foulée. Durant ce laps de temps entre la sortie de «Glauque Land, 25 ans d’Urbex» et la démolition de la maison je ne verrais passer aucune photo du lieu sur les réseaux sociaux ou ailleurs. Les seules autres photos que j’ai pu voir passer sont celles prises par des camarades d’exploration urbaine à qui j’ai indiqué où se trouvait la maison. Ci-dessous la maison en septembre 2024, vidée, et prise en photo sans entrer sur le terrain. Un lieu de plus qui disparait… Merci à Toub pour les deux dernières photos.










Pour terminer, voici quelques photos prises en photo sur place, et montrant le lieu à différentes époques. Les photos n’étant pas datées, il est difficile de savoir de quand elles datent, mais une personne experte en véhicules saura probablement déterminer de quand datent les voitures visibles sur la vue aérienne.



Enfin, voici des vues aériennes allant de 1934 à 2020, trouvées sur Google Earth et Géoportail. Même si ces vues n’apportent pas d’informations nouvelles par rapport à ce que j’ai pu montrer sur cette page, je les publie tout de même histoire d’être complet :