Important : Pour des raisons de confidentialité, de conservation, de sécurité (etc) je ne donnerais pas la localisation de cet endroit. Merci de votre compréhension.

Quand je viens explorer un lieu abandonné je ne pense (généralement) pas trop au relief. Enfin, disons que ce n’est pas la première préoccupation. Je suis là, à inspecter le site sur Google Maps, et je pense naïvement que tout est plat, uniforme. Je pense rarement à activer la fonction 3D. C’est donc une petite surprise d’arriver en vue du site présenté ici et de découvrir qu’il y a un peu de grimpette. Une grimpette qui réveille en ce début d’après-midi ensoleillé. Une grimpette pas bien méchante qui nous amène dans un cadre assez original : à proximité d’une autoroute, quelques maisons autour, un bois derrière, et au milieu de tout ça un imposant bâtiment à l’abandon.

En le longeant, Cafarnaom et moi apercevons quelques panneaux indiquant que le site est sous vidéo-surveillance. Mais l’est-il vraiment ? Les panneaux semblent dater… Quelques pas plus loin nous pénétrons sur le site via un grand trou dans le grillage pratiqué par d’autres personnes avant nous. Au bout d’une dizaine de secondes à évoluer entre divers arbustes les toilettes extérieures (semblant remonter à la construction du bâtiment, c’est-à-dire il y a un bout de temps) nous accueillent.

Comment entrer dans le bâtiment ? La question ne se pose même pas : toutes les portes sont ouvertes. Pourtant, lors de notre arrivée, Cafarnaom et moi avions vu que de nombreuses fenêtres étaient grillagées… Cela ne semble pas être le cas des portes. Il faut croire que le site n’est plus protégé ou entretenu depuis un moment. Enfin peut-être… Avançant à pas lents, nous découvrons l’intérieur du bâtiment, qui n’est pas très surprenant quand on réalise qu’il est 1) très en vue depuis la rue, et 2) très accessible. C’est donc dans une ambiance de vandalisme avancé et de tags un peu partout que nous évoluons. Est-ce gênant ? Pas vraiment. Ce qui m’avait intéressé en choisissant de visiter cet endroit, c’est son architecture, vraiment belle. Une architecture qui est d’ailleurs plus belle de loin quand on ne voit pas les tags (merci le drone) comme nous le verrons en fin de visite.

Tiens, il reste encore les lavabos ? Et ils ne sont pas explosés ? Vraiment curieux de tomber là-dessus quelques minutes après avoir visité une série de pièces vides, parfois remplies de vieux mobilier entreposé là depuis je ne sais quand. En tout cas ça donne un semblant de «vie» dans cet environnement à l’abandon.

Directement après nous découvrons ce qui était très probablement un ancien dortoir. Du moins la présence des lavabos à côté et des vieux lits toujours là ne laisse pas trop de doute. J’aime beaucoup la pièce que nous visitons. Elle a beau être vandalisée, il y a de jolies colonnes qui donnent un côté solennel à cette partie du lieu... Je me dois aussi de préciser quelque chose : lorsque je suis venu visiter ce lieu avec Cafarnaom, je ne connaissais que sa fonction (un ancien centre de formation) mais je n’avais vu aucune photo de l’intérieur, ni regardé aucune vidéo. Tout ce que je vois en explorant le site est donc une surprise pour moi. Et ça fait du bien ! Ça change des lieux que l’on vient explorer en ayant déjà vu passer quelques photos. Ici, tout est nouveau. Un plaisir assez rare dans l’exploration urbaine, même dans un lieu aussi tagué.

Continuant ma visite, je découvre un escalier de service plutôt joli, bien brutaliste comme l’ensemble du bâtiment. J’aime les trous carrés pratiqués dans la paroi, donnant (presque) un côté religieux à l’escalier. Ou du moins, solennel dirons-nous, comme les colonnes du dortoir. Avançant à pas lents, je découvre différentes pièces, et constate que tout est à peu près similaire, ce qui est (de toute évidence) souvent le cas lorsque l’on visite un lieu amené à comporter des dortoirs, des salles de classe ou des chambres… Pas trop de surprises, donc, mais quelques détails intéressants comme ce papier peint encore présent, ce graf plutôt joli dans un autre escalier, ce curieux personnage bleu à tête verte qui ouvre son ventre pour nous présenter ses entrailles, et à un endroit, curiosité : un reste de mur en placo qui n’a pas été fracassé. A travers lui on peut voir un visage peint sur le mur derrière. Je dois dire que je suis plutôt heureux de ce cliché.

Au détour d’un porte, surprise, nous découvrons ce qui était autrefois une petite salle de projection. Le plancher étant assez incertain, j’avance à pas lents et documente cette partie du centre de formation plutôt parlante comparé aux autres salles.

Avons-nous déjà visité en entier le bâtiment ? Pas complètement, car un escalier nous permet d’accéder au sous-sol. M’attendant à ne découvrir qu’une banale chaufferie, je suis surpris d’y découvrir, certes, la chaufferie, mais aussi des douches ! Enfin, je suis surpris de les découvrir au sous-sol, loin de tout. J’imagine le parcours que devaient faire les élèves du centre de formation, et ça semble un peu étrange de placer des douches aussi loin, et «en bas». Il faut croire que la plupart du temps ils faisaient des toilettes de chat dans les pièces contenant encore les grands lavabos ? Cette organisation démontre bien l’ancienneté des lieux.

La visite est terminée ? Il semble que oui. Cafarnaom et moi rebroussons chemin vers l’endroit par lequel nous sommes arrivés. En chemin nous réalisons que les panneaux «site sous surveillance» étaient bien dissuasifs. Ou alors le site n’était pas sous surveillance ce jour-là. Alors que je m’apprête à ranger mes affaires je vois un petit escalier de pierre assez mal en point et me souviens qu’il y a quelque chose que je n’ai pas pensé à exploré : le préau. Bon ok c’est juste un préau, il y a peu de chances que ça soit chouette, mais on sait jamais... Gravissant les marches, et m’écorchant au contact de quelques ronces, je découvre… une épave de voiture ! Qu’est-ce qu’elle fait ici sous le préau ? Mystère. Mais en tout cas elle donne un charme à cette partie du centre de formation. Elle me rappelle aussi la bd «Sunny» de Taiyou Matsumoto, même si ce n’est évidemment pas le même modèle.

Une fois dehors, je sors le drone et réalise quelques clichés :

Pour ce qui est de l’histoire du lieu, je n’ai malheureusement rien trouvé. J’ai écrit à la Mairie de la ville où est situé le bâtiment, mais n’ai reçu aucune réponse. Tout ce que j’ai pu savoir c’est que le site était un ancien centre de formation pour artisans. La vue aérienne la plus ancienne remonte à 1947 (ci-dessous), et à l’époque le bâtiment est déjà là, même s’il n’a pas exactement la même forme.

C’est entre 1947 et 1953 (vue aérienne ci-dessous) que le bâtiment est remanié, pour posséder sa forme «actuelle» lors de ma visite en 2025. On notera qu’il a une forme de E.

En 1957, le petit bâtiment qui donnait une forme de E au bâtiment n’existe plus. Le bâtiment est donc désormais en forme de U, comme sur la vue ci-dessous.

Ci-dessous des vues aériennes allant de 2000 à 2013. Quand le bâtiment a-t-il été abandonné ? Je n’ai pas réussi à le savoir. Je recevrais peut-être des informations suite à la publication de ce reportage.