Le jour où j’avais repéré par hasard un manoir abandonné à deux minutes de chez moi, je suis passé devant cet ancien atelier dont la porte grillagée était fermée (chaîne et cadenas). Aucun autre accès possible. Je suis repassé devant une semaine plus tard et, surprise, la porte était ouverte : chaîne présente, mais plus de cadenas... L’occasion était trop belle même si le lieu ne semblait pas très prometteur. Le lendemain, je décidais d’aller y faire un tour. En allant au travail le lendemain matin, je me suis dit que vu qu’il n’y avait qu’un seul accès (et une chaîne toute prête), pourquoi ne pas sécuriser ma visite ? J’ai donc acheté un cadenas à midi (je travaille à 300 mètres de chez moi), l’ai posé en revenant bosser, puis suis revenu vérifier ça une fois la journée terminée : cadenas toujours en place. Pas de mouvement, rien de suspect, du moins cet après-midi.



L’idée du cadenas avait un avantage : tranquillité absolue, personne ne pouvant entrer le temps de ma visite. Autre avantage : si quelqu’un essayait de rentrer (en forçant le cadenas) ça ferait assez de bruit pour que je l’entende et puisse me cacher. L’inconvénient était ce qui pouvait m’attendre là-dedans en cas de mauvaise rencontre : devoir ouvrir le cadenas serait un vrai problème. En cas de rencontre avec la Police, tout ça serait également compliqué à expliquer... Une fois mon matériel dans mon sac, je suis allé explorer cet endroit, que vous pouvez voir en couleur sur la photo ci-dessous.



Visiter un lieu abandonné en pleine ville est une expérience amusante. La première chose sympathique est d’observer les gens dehors sans qu’ils ne nous voient. On se sent un peu supérieur (alors qu’on ne l’est pas du tout) avec cette sensation de «Je te vois, mais toi tu ne me vois pas, et tu ne sais pas que je suis là». Y’a une espèce d’adrénaline euphorisante, le plaisir de l’interdit est bien plus fort que dans un lieu abandonné perdu en pleine campagne. La même adrénaline que les gens qui grimpent sur les toits.

























Sur place, pas grand-chose. Le lieu est abandonné depuis 2009 et ça se voit. De la poussière partout, de la crasse, de l’humidité… A un endroit, la toiture s’est effondrée. La photo satellite date de l’époque où elle était encore intacte, c’est le carré bleu sur la droite. L’eau qui s’est déversée depuis à cet endroit fait que le lieu possède des couleurs plutôt agréables à voir. Si la toiture était présente, le lieu serait tout gris/beige. Là, c’est gris, beige, mais aussi brun, kaki, vert foncé, noir… Niveau matière, c’est vraiment beau et très cool à prendre en photo.



























A certains endroits, divers artefacts renseignent sur la fonction passée du lieu. Clous, vis, outils, brosses… Classe à prendre en photo, surtout avec toute cette poussière accumulée depuis autant de temps sans que personne ne vienne toucher à rien. Dans la salle de bain, un mignon petit serin orne le carrelage. Sa couleur jaune/brun colle parfaitement avec le lieu.

















La visite se termine vite, les deux étages au-dessus étant malheureusement condamnés. Je reste encore un peu pour profiter de la sérénité procurée par le cadenas posé un peu plus loin. Je prends le temps de faire des photos de près, des détails… Puis je reviens vers le cadenas, l’ouvre doucement, et juste quand j’ôte la chaîne, une dame passe devant la grille, à un mètre de moi. Je ne bouge plus, pétrifié : dans ce genre de situation, il ne faut pas bouger. Il faut rester fixe, devenir le décor. Et c'est ce qui se passe : la dame ne me voit pas. Je range le cadenas dans mon sac, sort, remet la chaîne en place telle qu’elle était, et rentre chez moi.