Important : Pour des raisons de confidentialité, de conservation, de sécurité (etc) je ne donnerais pas la localisation de cet endroit. Merci de votre compréhension.


Juin 2023. Levé tôt, et après un tout petit peu plus de deux heures de route, me voilà face à la fameuse maison dont je vois passer des photos depuis un petit mois à l’époque de cette visite. Mais que vois-je passer exactement ? Des clichés montrant l’intérieur d’une maison abandonnée depuis quelques années. Jusque-ici rien d’extraordinaire, mais une des pièces de la maison est envahie de champignons. Pas commun, ça. Et pas envahie de cèpes ou de bolets, non, autre chose. Du mérule ? Peut-être bien. Visuellement, il y a là quelque chose de fascinant, et en ce qui me concerne, vraiment unique, quelque chose que je veux documenter avant que ça ne disparaisse. Ce sont surtout les filaments mycéliens au plafond qui m’impressionnent. Impossible de ne pas penser à la série «The Last Of Us», dont le mot «Cordyceps» m’inspire pour donner un nom fictif à la maison.

Nous verrons ces fameux champignons un peu plus loin sur cette page, mais revenons d’abord à mon arrivée : me voici dans un petit village comme il y en a tant en France. Un de ces villages où tout est construit le long de la «Grand Rue». Un de ces villages où en marchant cent mètres on passe devant le garage, la Mairie, la boulangerie et la Poste. La façade de la fameuse maison n’a rien d’original, c’est juste une banale maison comme on pourrait se l’imaginer. M’étant levé tôt pour cette visite, j’ai le temps de prendre un jus d’orange à la terrasse d’un restaurant situé à tout juste soixante mètres de la maison.

Pensant à ce que je m’apprête à visiter, je ne peux m’empêcher d’avoir une sorte de petit vertige : je suis là, à apprécier un moment dans un lieu «normal», et autour de moi les personnes que j’observe (serveur, rares passants) ne savent pas que je vais visiter un lieu incroyable situé à quelques mètres de là. Ces personnes savent-elles que la maison à l’apparence aussi banale qu’ils croisent tous les jours contient ces fameux champignons ? Il y a là un contraste qui me fascine. Deux mondes complètement différents qui ne se connaissent pas. La maison d’un côté, le restaurant de l’autre, juste à côté. Si proches, et en même temps si loin... Fin du vertige, il est temps de se mettre en route.

L’accès à la maison n’est pas bien compliqué. A peine quelque minutes après avoir quitté le café, me voici déjà sur le point d’entrer dans la maison. Pénétrant lentement par le salon, je découvre une grande pièce qui a visiblement été un peu retournée, et pourtant de nombreuses choses ne sont pas éparpillées au sol mais posées un peu partout, comme ces piles de vieux livres sur une table basse. Dans un coin, impossible de ne pas remarquer le magnifique piano.

Sur un coin de meuble je trouve la carte d’électeur de la personne qui vivait ici. Naissance : début des années 30. Tapant son nom dans Google, je tombe sur son avis de décès : 2018. Est-ce que cette personne est morte dans sa maison, ou a-t-elle été placée en Ephad avant ? Je ne le sais pas, mais la période de naissance me fait comprendre pourquoi tout ici semble ancien. J’ai la même sensation que lorsque je visitais la Maison Cherry : rien de récent ou un peu actuel sur place. Peu à peu, mes yeux se font à la (relative) obscurité régnant ici, tout comme à l’odeur de renfermé, qui annonce ce que nous verrons à l’étage. Au plafond, des signes d’humidité sont présents. Ci-dessous, des photos de cette première pièce visitée.













































Passant une porte, j’arrive à l’entrée principale, très sombre. D’ici, je peux accéder à la cuisine, à une autre pièce de la même taille que le salon, mais surtout à l’étage via un escalier. M’arrêtant un instant avant de décider où aller, j’aperçois les premiers champignons. Un peu partout sur les murs, des tâches noires ont envahi le papier peint. Etonnamment, elles ne courent pas sur le plafond. De loin, si l’on voyait la photo sur un écran d’ordinateur ou de smartphone on pourrait penser que c’est un incendie qui a créé toute cette noirceur. Il n'en est rien, c’est bien l’œuvre d’un champignon. La maison ayant probablement été trop bien fermée, l’humidité s’est développée, et voilà le résultat. La question est : en combien de temps est-ce que tout cela s’est développé ? Je n’en ai aucune idée.

Pénétrant dans la cuisine, impossible de ne pas être incommodé par différentes odeurs : humidité, aliments périmés : un mélange détonnant pour les narines. Essayant de ne rien toucher, je me sens envahi, presque étouffé par la quantité d’objets encore présents. Mobilier, aliments, couverts, médicaments, je ne peux pas m’empêcher de penser à la phrase qu’on lit absolument partout : «Il y a encore tout». Ouvrant la porte du frigo, quelle n’est pas ma surprise de constater qu’il est encore généreusement rempli. Ce que je n’avais pas prévu, c’est qu’en ouvrant la porte du frigo une puanteur mortelle s’en échapperait, me donnant envie de vomir. Essayant le plus possible de respirer par la bouche, je me mets à photographier cette pièce, éberlué par la quantité d’objets laissés ici.















Quittant la cuisine, je me dirige vers l’autre grande pièce située symétriquement par rapport à celui vu au début de la visite. Ici, point de canapé, nous sommes dans la salle à manger, et comparé aux deux autres pièces visitées, ici tout est à peu près en ordre. Le vieux poste de radio a-t-il été placé là par des amateurs de mises en scènes ? Peut-être bien. Malgré l’humidité présente dans la maison, je dois dire que ces volets fermés ne sont pas pour me déplaire tant il fait chaud le jour de cette visite.







Il est à présent temps de gravir les marches de l’escalier menant à l’étage. Mais cette ascension n’est pas aussi rapide que je le ferais d’habitude. Ici, j’essaye de faire attention à toucher le moins de choses possibles, que ce soit les livres posés sur les marches, la rampe de l’escalier ou les murs. On ne sait jamais. Je prends mon temps, et une fois à l’étage je documente ce que l’on voit lors de cette ascension. C’est si perturbant ces tâches noires un peu partout !







A peine arrivé à l’étage, une porte ouverte donne directement sur la fameuse chambre. Mais je n’y entre pas tout de suite : d’abord, les autres pièces. Je découvre la salle de bain, un bureau (très en vrac) et une autre chambre. Visiblement, le lieu n’a pas été visité que par des photographes, tout a été retourné par des gens cherchant probablement des objets de valeurs, pourquoi pas du liquide. Peut-être même que des explorateurs sont venus photographier le lieu, puis après avoir fait leurs photos, ont tout retourné, qui sait ? Comme ça, personne d’autres qu’eux prendront les mêmes photos. Il y a tellement de comportements différents dans cette pratique, tout est possible après tout. Ci-dessous, des photos des pièces situées à l’étage :











Nous arrivons alors à la fameuse chambre, celle que j’ai vu un peu partout sur les réseaux sociaux et qu’il me tardait de voir en vrai. Si c’est quelque chose de voir des photos sur un écran d’ordinateur ou de smartphone, c’est complètement différent de se confronter à la réalité, surtout ici, avec ce mur et ce plafond envahi de champignons. Etrangement, l’odeur n’est pas aussi forte ici que je l’aurais pensé.

Ci-dessous, deux photos montrant l’intérieur de la pièce. En comparant avec des photos que j’avais vu passer, il semble que des gens soient venus changer la position du lit et installer deux commodes de chaque côté pour créer une scène plus photogénique. De la manipulation comme j’en ai déjà vu auparavant, mais ici ce n’est pas aussi flagrant que d’habitude, ici, ça «passe» mieux.



Ayant terminé les photos ci-dessus, je reste un moment fasciné, presque émerveillé par ce qui recouvre les murs de la chambre. De nombreuses questions me viennent en tête : combien de temps est-ce que ça a pris pour que ces champignons recouvrent la pièce de la sorte ? Par où ont-ils commencé ? Est-ce grave de respirer l’atmosphère de cette maison ? (Remarque : j’écris ce texte un mois après la visite, et je me sens très bien.) Dois-je brûler les fringues mises le jour de cette visite ? Est-ce que ce genre de champignon peut se développer partout ?

Me disant que j’aurais peut-être des réponses à ses questions en postant cette visite sur les réseaux sociaux, je range le grand angle et sort le «petit» angle afin de bien documenter le curieux paysage qui s’offre à mes yeux. Contemplant tout ça de plus près, j’éprouve un curieux mélange de dégout et d’admiration, car à travers l’objectif de l’appareil je ne suis plus en train de photographier une pièce envahie de champignons, mais j’explore une planète inconnue. Un univers étrange où des rivières mystérieuses côtoient de sombres forêts. Par endroits, de curieuses tiges noires s’élèvent dans le ciel (ou pendent, vu qu’elles «poussent» au plafond de la chambre) et composent un paysage tel que je n’en avais jamais vu. Ci-dessous, le curieux paysage :











































Merci à Iloé pour le portrait ci-dessous !




La visite se termine par le grenier, où il fait une chaleur étouffante en ce début du mois de juin. Ici aussi les objets ne manquent pas, mais ici point de champignons ni d’humidité ni d’ambiance glauque : c’est un grenier comme j’en ai souvent vu en visitant des lieux à l’abandon. Après quelques clichés je range mon matériel photographique dans mon sac à dos, puis me demande quel sera le sort de cette maison. Qui achèterait un bien aussi attaqué par les champignons ? Acheter la maison pour la démolir et revendre le terrain ? Pourquoi pas. L’avenir nous le dira peut-être. D’ici là, les champignons auront sûrement encore plus envahi la maison. Fin de la visite, retour à l’air libre…



Note : les photos présentées sur cette page furent prises en Juin 2023. Fin Décembre de la même année, une image (voir ci-dessous) fut postée sur le compte Instagram "Urbex News", disant que la maison avait été vidée et qu'elle serait en cours de rénovation. Il ne sert donc à rien de chercher à connaitre sa localisation ou de s'y rendre.