Important : Pour des raisons de confidentialité, de conservation, de sécurité (etc) je ne donnerais pas la localisation de cet endroit. Merci de votre compréhension.


Une bien curieuse visite. En arrivant sur place, je constate un seul petit panneau indiquant que le lieu est «sécurisé». Le logo SECURITAS a pris du plomb dans l'aile avec le temps : les trois petits ronds rouges sont tous blancs. La pancarte est assez vieille, décrépie et cassée à un coin, du coup elle pendouille comme une vieille chaussette à la grille. Pour autant, il se peut qu'il y ait un vigile. Un gardien avec un chien ? Des caméras ? Des alarmes ? S'approcher des bâtiments sera-t-il possible ? Pourrais-je entrer dedans ? Ce sera la surprise. Le fait d'être seul pour cette visite procure un sentiment d'adrénaline qui me plait toujours autant.

Première surprise (à peu près prévisible) : l'accès au domaine est facile. Je me cache rapidement dans des buissons pour sortir mon matériel et commencer à faire quelques clichés. Le premier bâtiment que je croise ne présente pas un grand intérêt à première vue. Au cas où il serait sous alarme, je décide de ne pas y toucher. Si j'arrive à faire ma visite normalement, j'y jetterai éventuellement un oeil. A coté de ce bâtiment, un petit parc très sympathique où trainent encore des tables de pique-nique ainsi que, le long d'un chemin, des panneaux informatifs.

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Après cette courte promenade, mes yeux se fixent sur le grand bâtiment que je suis venu voir. Je le distingue au loin, derrière des branchages. Entre lui et moi, un chemin tout simple, et une rivière. Le chemin enjambe cette rivière. Plutôt que de risquer de me faire bêtement repérer, je bifurque, préférant faire un grand tour qui sera, certes, un peu plus long mais au moins, je resterais discret. Je ne sais pas si le capteur infrarouge ou l'interphone de la barrière fonctionnent encore mais je les contourne en prenant bien soin de ne rien toucher. On ne sait jamais.

Longeant la rivière, je découvre un très curieux édifice, de toute évidence une ancienne ferme, très belle, et avec une forme insolite très originale. Je n'arrive pas à me décider si j'ai déjà vu un bâtiment comme ça dans un film se passant en France au moyen-âge, au Japon à l'époque des Samouraïs, ou aux USA dans un western. La structure a vraiment de la classe, et on voit qu'un effort a été apporté à sa bonne conservation. La toiture est impeccable et toute la base est murée : il sera impossible d'y entrer. C'est le prix à payer pour pouvoir contempler des bâtisses en bon état.



Juste derrière cette ferme à l'allure si particulière, je découvre, perdue dans les hautes herbes, une autre ferme, plus petite, mais avec également beaucoup de charme. Je suis surpris de l'absence de tags ou de graffs alors que l'accès est si facile. Ici, on peut entrer dans les bâtiments. Je découvre une grande pièce vide et taguée. Des gens viennent ici pour s'amuser sur les murs.


















Alors que je me demande si je tomberai sur un de ces tagueurs, mon sang se glace en entendant un bruit assez flippant : celui d'une personne appelant son chien pour qu'il revienne vers lui. Vous savez, le bruit qu'on fait en faisant claquer sa langue contre la bouche ouverte en coin. En entendant ça je me dis «C'est bon, le vigile est pas loin, son chien m'a vu et il vient me chercher.»

Me cachant derrière un mur, j'attends. Je me dis que la visite est foutue, que j'aurais dû être plus discret etc. Mais personne ne vient. J'entends pourtant le bruit qui continue juste à coté de moi. Où est ce type que j'entends mais ne vois pas ?! Tout à coup, complètement stressé, je vois un oiseau passer juste devant moi et se poser sur un rebord. Et je le vois ouvrir son p'tit bec et produire le bruit. C'était lui ! Bien joué petit, tu m'as bien filé les chocottes. Le voilà, ci-dessous.




Montant un escalier pas très rassurant, je progresse vers l'étage afin de voir si il y a des choses... Et il n'y en a pas beaucoup. Des tags figurent ici et là, confirmant que les petits jeunes du coin viennent squatter tranquillement. C'est vrai que le lieu est cool et isolé de tout. La visite étant assez rapide, je me diriger vers le grand bâtiment que je suis venu visiter, en faisant toujours attention à bien longer le plus discrètement un éventuel chemin de ronde emprunté par un gardien.
















Trois minutes après avoir traversé la rivière sur un petit pont bien rouillé, je découvre une toute petite grotte façon Buttes Chaumont, avec un petit point d'eau à coté. L'endroit est très pittoresque, c'est amusant de croiser ça et d'imaginer que plein de personnes sont passées là avant moi, calmement, alors que moi je fais très attention à ne pas me faire repérer.









Quelques instants après avoir quitté la grotte, me voici devant une des ailes du grand bâtiment que je suis venu voir. Je dis «grand» mais plus je m'en approche et plus je me rends compte qu'en fait c'est «très» grand. Il y a tout d'abord un château qui semble assez ancien, probablement XIXème siècle. Puis, collé à lui, et plus récent, une autre structure, bien plus massive, se dessinant derrière les branchages. Le style fait penser à un bâtiment construit dans les années cinquante. Un look «retro» et un chouïa religieux (arches, colonnes etc) plaqué sur une architecture de béton.




Le lieu est très propre. Absolument aucune dégradation, ni tags ni graffs. Presque comme si j'étais la première personne à visiter le lieu depuis sa fermeture dont la date m'est inconnue. Le lieu est-il entretenu ? La pelouse n'a pas trop l'air sauvage. Il y a probablement un peu d'entretien de temps en temps, ou une surveillance. A propos de surveillance, toujours pas de vigile en vue... Le long d'un pan de mur, d'étranges sculptures ornementales sont fixées à la facade.




















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Cela fait plusieurs portes que je croise et je constate que des grilles sont installées par-dessus. En matière de protection, ça évite de poser des parpaings qui défigurent un peu le lieu. Si j'arrive à entrer, j'aurai de la lumière. On verra ça plus tard, continuons le tour. A quelques rares endroits, de la mousse pousse sur les pierres, sur un escalier, ici ou là. Mais globalement tout ça est très propre. Au point que je me dis que l'intérieur ne sera pas forcément intéressant à visiter. Tout sera clean, zéro poussière... Nous verrons bien.










Le ciel bleu parfait au-dessus de ma tête aide beaucoup à l'ambiance sereine qui m'habite depuis que j'ai quitté la ferme vue un peu avant. Pour autant je reste un peu sur mes gardes, observant le plus possible à gauche, à droite ou derrière moi, guettant l'apparition d'un gardien. Une grille m'empêche de visiter une cour assez poétique avec cet arbre poussant dedans. Au loin on distingue du lierre, des plantes poussant sur le sol. Ca ferait une très belle photo mais impossible d'y accéder à moins d'escalader une grille haute d'environ deux mètres.




J'ai fait le tour des lieux, me voici revenu devant le château vu tout au début de ma ronde. Toujours pas de vigile, pas d'alarme, rien, je gravis quelques marches et découvre un sublime angelot accoudé sur un vieux vase tout rouillé. Je me demande pourquoi l'angelot a un air au aussi boudeur. En faisant le tour, j'en découvre la raison : le pauvre a plein de boue sur son coté gauche.









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Bon, et si on regardait si on peut entrer dans cette grande forteresse ? J'inspecte un peu plus en détail la façade, les recoins, des fenêtres peut-être mal fermées. Et au bout d'un moment, à force de fouiner, j'arrive à pénétrer dans une espèce de petite cour à l'allure très particulière, à la fois ancienne (même si c'est du faux ancien) et futuriste avec le design de ces «skydomes» que je décide de nommer «ovniettes». Ce sont évidemment de «simples» puits de lumière, mais ils ont beaucoup d'allure je trouve, un coté retro très sympa, surtout avec cette mousse dessus.







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Juste derrière une des ovniettes, je distingue une fenêtre ouverte. Après avoir inspecté s'il n'y avait pas de détecteur d'alarme, je m'introduis dans une petite pièce. Ca y est, me voici dans les lieux, moi qui pensais que tout ça était inaccessible quelques instants avant... Enfin, une surprise un peu teintée d'inquiétude, car je constate qu'il y a encore du courant. Et si il y a du courant, probablement une alarme. J'avance donc très prudemment, scrutant chaque recoin et me préparant à décamper si ça sonne. Comme je m'y attendais un peu, je découvre de grands couloirs et de grandes salles vides. Tout le monde est parti, il ne reste plus rien si ce n'est d'infimes détails qui renseignent un peu sur l'activité qui animait ce lieu.

















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Ma visite continue dans un calme absolu jusqu'à ce que je décide de m'arrêter car j'entends quelque chose de pas rassurant : un son, au loin, très faible, mais que je semble reconnaitre. Comme une alarme de voiture, sauf qu'il y a zéro voiture dans le coin. Un peu inquiet, je rebrousse chemin.

Avançant d'un pas pressé dans le long et beau couloir que j'ai emprunté, je fais rapidement quelques photos histoire de documenter ma visite, et constate avec joie que le son s'est arrêté. Ce n'était donc qu'une voiture ? Vraiment ? Je pousse un soupir de soulagement, mais, surprise, un autre son retentit : un téléphone !

J'en déduis que l'alarme a sonné chez une société de surveillance (ou la Police) et que la personne au bout du fil est en train d'appeler pour vérifier qu'il y a quelqu'un, et que c'est «normal» (genre le propriétaire ou des ouvriers). Je décide de ne pas en savoir davantage, range rapidement mes affaires et ressort à toute vitesse du bâtiment, puis du domaine tout entier. Visite terminée ! Ci-dessous, deux vues aériennes du lieu en 1969 puis 1970.