«MAMAN,
j'ai faim. J'ai cru mourir», ce sont les premiers mots qu'a balbutiés
Denis à sa mère avant de s'évanouir. Pour échapper
à ses agresseurs, ce jeune homme âgé de 22 ans,
originaire du Pecq-sur-Seine (Yvelines), s'est perdu le 15 Mai (2000)
dernier dans le dédale des galeries des carrières désaffectées
de Bougival, creusées sous la colline rendue célèbre
par les peintres impressionnistes. Pendant dix jours, il a cherché
la sortie... sans jamais la trouver. Plongé dans l'obscurité
la plus totale, seulement vêtu d'un jeans et d'une chemisette,
sans rien à manger ni à boire, Denis a « cru devenir
fou, raconte sa mère, il m'a dit j'avais peur, à un moment
j'ai senti que c'était fini ». Vendredi dernier, des jeunes
qui s'étaient réunis dans une des galeries de cette carrière
du côté de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), l'ont aidé
à sortir avant de l'abandonner sur la RN 13 à proximité
du chantier de la A 86. Denis a été récupéré
par un chauffeur de taxi qui l'a ramené chez ses parents. «
Un jeune ébouriffé et pieds nus s'est approché
de ma voiture et m'a demandé mon téléphone. Il
parlait lentement et semblait très fatigué. J'ai cru qu'il
sortait d'une cave », témoigne le taxi. Placé en
soins intensifs à l'hôpital de Saint-Germain-en-Laye, Denis,
traumatisé, a rejoint le service psychiatrique de l'hôpital.
A l'origine des faits, une soirée qui a
tourné au cauchemar. Le 15 mai dernier, Denis avait rendez-vous
dans la soirée avec des copains devant l'entrée de la
carrière, un des rares accès aux galeries qui ne soit
pas bouché. Arrivés devant la grotte, les copains n'étaient
pas là. Il s'est alors engouffré dans les couloirs. «
Il y avait quatre jeunes, m'a-t-il dit, poursuit sa mère, ce
n'étaient pas les copains que je devais voir... Ils ont commencé
à me dire que c'était leur territoire et m'ont bousculé...
J'allais partir quand ils m'ont empêché de sortir. »
Les quatre jeunes l'auraient alors frappé avant de lui demander
de se déshabiller. Il a réussi à s'enfuir en arrachant
son pantalon et sa chemisette. Denis, qui dans l'échauffourée
a perdu sa lampe, s'est retrouvé au milieu de nulle part, cherchant
désespérément une issue. Couvert d'hématomes,
de blessures suite aux chocs contre les parois, Denis a continué
à avancer. Sa survie, il la doit à l'eau qui suintait
des parois et aux petites flaques d'eau qu'il rencontrait au milieu
des boyaux. « De l'eau coule dans certaines salles, il y a même
une fontaine, témoigne Bruno, 17 ans, qui s'est récemment
aventuré dans ces galeries. C'est immense, il paraît que
ça va jusqu'à Paris.
Si
on est mal équipé, on tourne vite en rond puis on se perd.
» Cet adolescent n'a jamais fait de mauvaises rencontres, mais
ne descendrait jamais sous terre seul la nuit. « Cela faisait
dix jours que j'avais lancé un avis de recherche au commissariat
dit Dominique, la mère. Quand le taxi nous l'a ramené,
il était couvert de boue. Il tenait à peine debout. Après
le bain, il s'est évanoui ». Depuis le retour de son fils,
Dominique a entrepris un combat pour la fermeture définitive
des accès aux galeries. « En janvier déjà,
dit-elle, un jeune s'est retrouvé dans le coma à la suite
d'un éboulement, faut-il attendre qu'il y ait un mort ? »
Une enquête sera ouverte par le commissariat du Vésinet
dès que Denis sortira de l'hôpital, afin de déterminer
les circonstances de cette mystérieuse agression et disparition.
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