Important : Pour des raisons de confidentialité, de conservation, de sécurité (etc) je ne donnerais pas la localisation de cet endroit. Merci de votre compréhension.

En ce gris matin, la première impression que l'on a du bâtiment est tout simplement grandiose. Une structure massive, des fenêtres ovales très photogéniques, et surtout cette sensation d'immensité, d'évasion (et de sérénité, aussi) procurée par ce grand lac au bout du duquel se dresse l'objet de notre curiosité.



Le lac en question était en fait une ancienne carrière à ciel ouvert servant à extraire de la chaux et du charbon. Celle-ci était ensuite acheminée vers le bâtiment via un système de wagonnets passant dans le tunnel dont on voit la sombre entrée juste sous l'édifice. Au dernier étage du bâtiment principal se trouvait une marbrerie qui se servait de l'eau calcaire pompée dans la carrière (afin d'éviter l'inondation) pour faire du polissage. Tout était fait pour maximiser le rendement de l'installation et utiliser le maximum des ressources disponibles, y compris celles considérées comme nuisibles pour la production principale.

De ce bâtiment partait ensuite un tunnel qui débouchait deux kilomètres plus loin à flanc de coteau près le fleuve pour emmener la production vers les bateaux pour le transport. Contrairement aux chevalements classiques, disposés au dessus de la mine avec l'ascenseur pour y descendre, ici le tunnel minier se trouvait au sommet du chevalement avec l'ascenceur pour descendre jusqu'au quai. (Merci à Laurent pour ce paragraphe et le précédent.) Le temps ayant fait son �uvre, la carrière est devenue un lac. Nous n'explorerons pas ce tunnel par manque de temps mais surtout par souci de sécurité, le lieu ayant été construit il y a plus de cent vingt ans. Au loin, je distingue quelques oiseaux tournant autour du sommet de l'antique bâtisse : il ne manque plus que des créneaux, des drapeaux et pourquoi pas des squelettes dans des cages suspendues et on se croirait revenu au moyen-âge.



Se diriger vers le bâtiment en passant le long du lac étant trop dangereux, nous faisons un grand tour et passons de l'autre coté. Marchant le long de l'ancien chemin d'accès, nous passons sous un contrefort soutenant la colline sur laquelle est adossée la structure. Mais est-ce une colline naturelle ? Pas du tout, il s'agit en fait d'une accumulation de pierres (comme un terril) entassées ici après avoir été extraites de la carrière vue plus haut.



Enfin, nous voici devant le grand bâtiment. Déjà assez majestueux de loin, il l'est encore plus quand il est juste une dizaine de mètres plus loin. Le lierre a recouvert une petite partie de l'édifice, heureusement pas assez pour le cacher, juste ce qu'il faut pour donner un joli cachet à la construction.



Levant la tête, j'aperçois la cime d'un arbre dépassant du sommet, signe que le lieu est (on s'en doutait un peu en arrivant) une coquille vide sans aucun plancher, à la manière du Palais de King Louie, une autre magnifique ruine. Niveau ambiance sonore, nous sommes gâtés : une trentaine de volatiles piaillent en tournoyant autour du donjon. Je dis "donjon" car on a vraiment l'impression d'être face à un vieux château fort.



L'entrée rappelle un peu les pièces voutées de la Batterie de la Pointe.



Après avoir traversé un couloir long d'une dizaine de mètres, surprise, nous ressortons de l'autre coté du bâtiment, le passage emprunté passant en fait juste sous l'édifice. Avant de nous rendre au rez-de-chaussée, nous faisons le tour des lieux en nous frayant un passage à travers la végétation poussant absolument partout. A travers les branches, la structure se dévoile peu à peu, avec des angles surprenants, et assez flippants, rappelant la bibliothèque du "Nom de la Rose".



Regardant en bas, sous ces voutes, j'aperçois un puits assez large, conduisant directement dans le tunnel que nous avons vu quand nous étions au bord du lac. Faisant un petit tour, et passant sous une petite voute à moitié remblayée, j'arrive face au vide. Regardant avec appréhension, je me rends compte alors d'une chose : aucun panneau, aucune barrière. Ce puits, absolument non sécurisé, fait vraiment froid dans le dos, car il serait très facile d'y chuter, et en remonter semble une tâche impossible... Il faut croire que tout le monde ne prends pas le temps de venir ici, et c'est tant mieux.





Quelques pas plus loin, je repasse sous une autre petite voute et découvre deux tunnels. Le premier, pas très intéressant, passe sous l'édifice et ressort derrière, près de l'entrée. Le deuxième, plus intéressant, est vraiment long et suit une courbe longeant le lac, pour finir à l'air libre, là où un arbre a décidé de s'installer. A quoi servait ce long tunnel ? Très probablement à récupérer les eaux d'écoulement comme en atteste le sol très lisse du tunnel.









Revenant sur nos pas, nous nous dirigeons alors vers le rez-de-chaussée. Là, nous découvrons alors la fameuse coquille vide que nous avions devinée de l'extérieur. Le résultat architectural est à la hauteur de nos espérances, photographiques comme émotionnelles :







Les planchers et la toiture ayant disparus, il n'est guère étonnant de trouver un arbre poussant au beau milieu de ce qui est désormais une vaste cour d'où l'on peut contempler les vieilles fenêtres ovales, toujours en place, et vraiment belles. Lierre, vieilles pierres, il y a de quoi contenter tout amateur de ruines qui se respecte.







Peut-on voir tout cela d'un peu plus haut ? Malheureusement, non, car au fond de la cour, on accède à une petite salle ouverte au quatre vent, et dépourvue d'escalier. Un escalier vieux de plus d'un siècle, remarquez, je ne m'y risquerais pas trop, surtout quand on voit l'état de la structure juste au-dessus...







Nous sortons alors de la grande et belle ruine, repassons devant la jolie façade, le contrefort, puis faisons un crochet pour voir ça de l'autre coté : le spectacle n'est pas décevant, la bâtisse est tout aussi majestueuse de ce coté-ci. On distingue d'ailleurs bien mieux le "creux" de la tour, par où étaient montées la matière prise à la carrière, et transformée (j'imagine) dans les étages. Le très dangereux puits vu plus haut est tout en bas de cette fameuse tour.











Ci-dessous à gauche, le terril (colline formée par les restes de pierres extraites de la carrière) que l'on a pris soin de renforcer, formant ainsi une sorte de mur qui pourrait passer pour un gros bâtiment abritant des salles alors qu'en fait il est plein.



La visite de cette partie du site étant terminée, nous nous dirigeons vers ce qui reste à explorer, à savoir une maison, très probablement celle du propriétaire. Nous découvrons un lieu en mauvais état, mais qui, semble-t-il, a subi des réparations, réparations qui n'ont cependant pas empêché le bâtiment de se dégrader :













Visite finie ? Pas tout à fait ! Jetant un coup d'oeil par une des fenêtres, nous apercevons quelque chose que nous n'avions pas du tout repéré en arrivant sur place : un four à chaux ! Bien carré à l'extérieur, et très probablement rond à l'intérieur. Détail qui tue: on a pris soin de construire trois voutes sur la façade du four. D'un intérêt purement esthétique, elles donnent un très beau cachet au lieu, on croirait que tout ceci a été construit par le Peuple Nain. Ici et là, d'inquiétantes fissures font un peu craindre que le tout ne se casse la figure un jour. Une très bonne raison pour documenter tout ça avant un futur effondrement.









Une fois dans le four, pas de surprise, c'est exactement ce à quoi je m'attendais, mais qu'est-ce que c'est beau ! Admirez-moi toutes ces pierres posées les unes par-dessus les autres, formant un puits avec à son sommet des branches bien chouettes :







Enfin, notre visite se termine par une photo faite dans un petit tunnel (d'écoulement des eaux) situé juste à coté du four. Vraiment une belle visite que cette ancienne forteresse endormie !





Passons à l'histoire du site : comme vous avez pu le lire, il s'agissait d'un lieu où l'on extrayait de la chaux et du charbon. Construit dans la deuxième moitié du XIXème siècle, le site ne fonctionna qu'à peine trente ans, et est toujours debout un peu plus de cent vingt années d'abandon plus tard lors de cette visite. Respect ! Les vues aériennes disponibles sur Géoportail ne commençant qu'au début du XXème siècle, impossible donc de trouver des vues du lieu en activité. Voici cependant les meilleures images que j'ai pu trouver, et qui donnent une meilleure idée de la topographie du lieu.